Blog scientifique, technologique, environnemental et politique de Nicolas HAHN

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Moi Président: la fiscalité du diesel

Moi aussi Président!

Au travers de ce premier billet classé dans ma section politique, mais qui aurait pu l'être dans ma section dédiée à l'environnement, j'expose qu'elle aurait été ma décision concernant la fiscalité sur le diesel si j'avais été à la place de nos "élites gouvernantes".

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Le débat fait actuellement rage autour de la question de la fiscalité du diesel. La majorité au pouvoir et l'un de ses alliés, les écologistes pour ne pas les citer, se déchirent autour de cette question et en font manifestement des tonnes, usant de force menaces de part et d'autre. On aura bien compris qu'il s'agit là de politique bassement politicienne qui ne fait qu'amuser la galerie que constitue le peuple. Enfin amuser... disons que beaucoup ne s'amusent plus...

La problématique est donc la suivante: faut-il augmenter les taxes sur le diesel et à quelle vitesse?

Voici l'état de mes considérations en la matière.

Le diesel a une responsabilité de plus en plus forte et de plus en plus clairement établie dans le prochain scandale sanitaire à large échelle. Les tous premiers rapports en faisant état datent de 1983 (rapport Roussel). Les polluants émis par le diesel, plus spécifiquement, sont classés cancérogènes. Le filtre à particules (le FAP) a tenté de corriger un problème en en créant d'autres en tout état de cause, plus graves, quand les propriétaires de véhicules ne procèdent tout simplement pas à un déFAPage, ce qui devient de plus en plus fréquent...

Or on le sait, le parc automobile français est à écrasante majorité diesel. 42000 morts par an seraient attribués aux nocivités du diesel pour la France. Soit 10 fois plus que les 4000 morts par an pour conduite inadaptée (vitesse, alcool, drogues, ...) On a de tout temps, vendu le diesel comme étant plus économique en terme de consommation, plus économique à la pompe en raison d'une fiscalité favorable, et maintenant aussi plus propre, pour ainsi dire lavant plus blanc que blanc. Sur ces quelques bases là, les commerciaux des différents constructeurs vous vendent du diesel et pratiquement que du diesel. Pour autant, un véhicule diesel est vendu plus cher à l'achat, et coute plus cher à entretenir.

Mais en considérant bien les choses, on remarquera que:

 

  • l'écrasante majorité des véhicules diesel ne font que peu de kilomètres, car sont utilisés sur de petites distances, or pour commencer à devenir quelque peu rentable, un véhicule diesel doit faire 20000 km par an minimum.
  • les risques établis pour la santé sont élevés
  • l'écart entre le prix au litre de l'essence et du diesel s'est réduit ces dernières années
  • un parc pratiquement tout diesel a des conséquences très néfastes sur l'équilibre de l'industrie du raffinage avec de graves conséquences économiques et en terme d'emplois
  • les moteurs à essence n'ont pas à rougir de leurs progrès par rapport au moteur diesel, rendant beaucoup moins évident le choix de ce dernier si on prenait tous la peine de bien réfléchir par nous-même
  • les années avancent, le climat se dégrade, et malgré les discours on ne fait que du saupoudrage insignifiant pour limiter les impacts qui ne manqueront pas de survenir

Je considère que l'on a pas le temps d'attendre, d'autant plus que la volonté du "Moi Président" actuel est de ne surtout rien faire en la matière avant 2015.
Autrement dit, d'éventuelles décisions en la matière seront laissées à ceux qui viendront après. On ne doit pas continuer à favoriser le diesel à ce point considérant les quelques remarques ci-dessus, et certainement d'autres non citées ici. Et on sait qu'il n'y a qu'en s'en prenant au porte-monnaie, comme d'habitude, que l'on arrive un peu à faire avancer les choses.

Il faut des changements forts et profonds, même si ça fait mal, pour non pas éviter les problèmes notamment tournant autour du changement climatique, mais pour espérer les limiter. Et aussi pour autant que faire se peut préserver la santé du peuple.

Si d'aventure je devenais un jour le prochain "Moi Président", voici quelles seraient mes décisions en la matière:

 

  • YES, WE CAN augmenter le prix du diesel (oui, on peut augmenter le prix du diesel).
  • Il devra augmenter à raison de 2 centimes d'euro par mois sur une période de 3 ans (hors autres mécanismes de fluctuation des prix)

 

De quoi j'en entends beaucoup qui crient? Vous avez raison... C'est plus compliqué que cela. On ne peut pas mettre cette décision en œuvre de façon aussi simpliste. Cette loi s'inscrirait donc dans le cadre d'un programme un peu plus vaste pour l'accompagner. Il faut jouer sur plusieurs tableaux en même temps, car s'en prendre au seul consommateur est inadapté et trop simpliste. Après tout, si on en est là aujourd'hui, c'est à cause du gouvernement et des constructeurs automobiles.

En tant que "Moi Président", voici quel serait mon programme en la matière, susceptible d'évoluer au fil du temps par édition de ce billet.

Tout d'abord les contraintes:

  • mettre fin au GPL à échelle 5 ans, cela reste un combustible fossile et c'est un marché de niche à supprimer
  • mettre fin au GNV pour véhicules à échelle 5 ans, cela reste un combustible fossile et c'est un marché de niche à supprimer
  • augmentation du prix au litre du diesel de 2 centimes par mois sur une première période de trois ans. Ensuite, poursuite de la hausse à raison d'un centime d'euro par mois sur les années suivantes.
  • stagnation du prix du litre de l'essence (hors fluctuations habituelles) sur une première période de trois ans. Ensuite, hausse à raison d'un centime d'euro par mois sur les années suivantes.
  • tous les véhicules à moteur thermique, dont le principe de base est donc la combustion de matière et donc l'inévitable émission de polluants n'auraient plus le droit à un quelconque bonus. Les voitures hybrides rentrent dans cette catégorie, bien entendu.
  • Le malus plancher sera de 490 euros, et le malus plafond sera porté à 25000 euros (pour que ce soit clair pour tout le monde: vingt cinq mille euros)
  • Le malus plafond ne concernera que les véhicules d'une puissance supérieur à 300 chevaux DIN. Le plafond pour les voitures de puissance jusqu'à 300 chevaux DIN sera de 5000 euros.
  • Le malus sera exigible chaque année à défaut de quoi la carte grise sera annulée (c'est comme cela que fonctionnent la Suisse et le Luxembourg à titre d'exemple)
  • Obligation pour tous les constructeurs français de véhicules de se conformer par la loi au passage de tous leurs modèles sur un banc de test "cycle français" dont les critères sont adaptés à la conduite du français lambda (Voir pour se faire cet autre billet que j'ai écrit il y a quelques heures). Ils ont deux mois pour se conformer à ce nouveau test.
  • Obligation de révision de l'étiquette énergie des véhicules à la vente, pour y faire figurer des informations cruciales qui sont omises aujourd'hui (niveaux d'émission de polluants tels le NO2, le NOx, ... en ppm/m³ d'air), ainsi que les valeurs de consigne utilisées pour le test en "cycle français" (expliquer les conditions du test en somme)
  • Obligation de mentions à l'image de celles figurant sur les paquets de tabac, pour toute publicité TV, Radio, ou en utilisant d'autres médiums, traitant de véhicules thermiques
  • Prélèvement d'une taxe directement auprès des constructeurs automobiles, fonction du nombre et de la puissance des véhicules thermiques produits, qui abonderait les caisses de la sécurité sociale et alimenterait un fond spécial dédié aux malades "des particules fines". C'est un scandale sanitaire qui ne manquera pas de venir. Il est d'ailleurs déjà là et c'est un feu qui couve et qui n'attend que le bon moment pour bondir dès qu'il aura plus de carburant...
  • Contrôle du prix à la vente des voitures propres afin de s'assurer que les constructeurs vendent "au juste prix" et n'abusent pas du système de subventions mis en place, au moyen de la participation de l'état dans les actionnariats des entreprises
  • Obligation d'un contrôle technique annuel pour tout véhicule thermique et dès leur première année de mise en circulation, comportant une batterie de tests étendus concernant toutes les émissions polluantes (CO2, NO2, NOx, ...), le test par opacimètre n'étant plus autorisé.

Ensuite les aides:

  • L'intégralité des sommes apportées par le malus ainsi que par la taxe supplémentaire sur le diesel sont portées à une politique de subvention par bonus
  • Ce bonus ne pourra être appliqué que sur les véhicules utilisant les énergies nouvelles qualifiées d'environnementalement et sanitairement propres (électricité, hydrogène mais pas dans le cadre d'une combustion directe: dans le cadre d'une pile à combustible)
  • On conserve le bonus actuel de 7000 euros minimum (bonus plancher)
  • Le bonus peut au maximum atteindre une somme de 70% du prix final du véhicule hors TVA, plafonné à 22000 euros
  • Un bonus conservatoire de 1000 euros est versé annuellement tant que le véhicule est "roulant" et qu'il n'a pas atteint une limite d'âge de 4 ans révolus, sous conditions de revenus (salaire brut plafonné à 30000 euros par an pour un célibataire, 45000 euros par an pour un couple)
  • Prise en charge des personnes présentant un caractère social très dégradé, qui n'ont pas les moyens de posséder autre chose qu'un véhicule thermique et par conséquent, qui ne pourraient pas accompagner, ou plutôt subir la transition: édification d'un concept de "prime sociale à l'achat de véhicule électrique" prenant en charge 90% du montant global d'une voiture électrique qualifié de "modèle de base de voiture propre d'Etat" (je n'en vois que deux qui pourraient obtenir ce label: Bluecar de Bolloré ou ZOE de Renault). Les 10% du reliquat de prix restent à la charge des personnes, moyennant octroi d'un prêt à taux 0, ou un système de micro-crédit.
  • Octroi de subventions dont le remboursement n'est pas exigé aux constructeurs automobiles, fonction du nombre de véhicules répondant parfaitement à la qualification énoncée en début de paragraphe et étant effectivement mis à la route, et qui doivent être dédiées à la R&D en matière de nouveaux moyens de stockage de l'énergie électrique pour véhicules
  • Octroi de subventions dont le remboursement n'est pas exigé aux constructeurs de véhicules hors voitures particulières, permettant le développement de moyens de stockage d'électricité pour camions, semi-remorques, bateaux, etc...
  • Utilisation des fonds collectés grâce au malus pour doter les villes de bornes publiques de recharge de forte puissance (de 22 kW à 43 kW)
  • utilisation des fonds collectés grâce au malus pour doter les stations services sur les autoroutes de dispositifs robotisés d'échange de batteries. Faire en sorte que les constructeurs automobiles français adoptent tous le même modèle physique de batterie (on parle donc du boitier contenant les batteries, pas de la technologie de batterie en elle-même, qui peu différer d'un constructeur à l'autre), facilitant le développement des stations d'échange robotisées.
  • Utilisation des fonds collectés grâce au malus pour aider les constructeurs automobiles à développer et mettre à la route des véhicules électriques capables de parcourir 500 km minimum (à une vitesse stable de 70 km/h) en une seule charge (voie des batteries Lithium-Sulfur ou Metal-Air)
  • Aides possibles pour les professions ne pouvant pas faire autrement qu'utiliser une quantité massive d'hydrocarbures (métiers de la pêche par exemple).

Voilà ce que je proposerais. Bien entendu, on oubliera pas de ré-évaluer tout ce package de mesures tous les trois ans.

Cela me paraît équilibré, et bien expliqué, cela ne devrait pas permettre de levée de boucliers. La transition serait "forcée" mais au final le contrat serait gagnant-gagnant pour tout le monde, y compris pour la balance commerciale du pays à terme.